Résumé GLKFJ
La chimiothérapie néoadjuvante est une chimiothérapie séquentielle avec anthracyclines et taxanes: même protocole pour toutes les patientes ?
The neoadjuvant chemotherapy is sequential combining anthracycline and taxane :same regimen for all patients ?
F Dalenc, Oncologie Médicale, IUCT-Oncopole, 1 avenue Irène Joliot Curie, 31059 Toulouse Cedex 9
chimiothérapie néoadjuvante, biomarqueur, imagerie moléculaire
neoadjuvant chemotherapy-biomarkers-molecular imaging
Lorsque l’indication d’une chimiothérapie (CNA) est retenue, les guidelines recommandent un schéma comportant une anthracycline et un taxane, préférentiellement de façon séquentielle (avec trastuzumab, si la tumeur est bien sûr HER2+) ... finalement le même traitement pour toutes et comme en adjuvant !
Quelles seraient les alternatives selon le profil immunohistochimique des tumeurs ?
→ Pour les tumeurs triple-négatives (TNN).
Un schéma contenant une anthracycline et un taxane, en séquentiel, conduit à des taux de réponse histologique complète (RHC), biomarqueur indiscutable de survie à long terme pour ces tumeurs, de 30 à 40%. Cependant, il existe une importante différence de chimio-sensibilité liée i) au micro-environnement tumoral (la quantité de TILs est un facteur de RHC) et ii) à la diversité moléculaire des TTN (selon la classification de Lehmann notamment: par exemple les TTN dites LAR, riches en récepteurs aux androgènes, affichent de très faibles taux de RHC mais ont pourtant un "bon pronostic" alors que les tumeurs dites BL1 -Basal Like 1- sont celles pour lesquelles le taux de RHC est le plus élevé après une chimiothérapie séquentielle, qui de plus est corrélée à la survie). Un faisceau d’arguments cliniques et biologiques n’est pas en faveur de l’abandon des anthracyclines. Des schémas sans taxane (mais avec sel de platine) pourraient se discuter dès lors qu’il existe des anomalies de la recombinaison homologue (HRD) et sont en cours d’évaluation. Plusieurs études prospectives ont démontré que le carboplatine majore le taux de RHC, mais au prix d’une toxicité, surtout hématologique, plus importante et le bénéfice en survie n’est pas démontré. De plus, de nombreuses questions demeurent sans réponse: quel est le schéma/dose optimal(e) d'administration du carboplatine et pour quelles patientes (mutées ou pas BRCA) ou pour quelles tumeurs (avec ou sans anomalie de la HRD) ? Enfin, l’étude du NSABP-B40 montre que l’ajout d'un anti-métabolite (capécitabine ou gemcitabine) à un traitement séquentiel ne majore pas le taux de RHC. La prescription à l'avenir de thérapies ciblées de type inhibiteur de PARP, inhibiteur du récepteur aux androgènes +/- de PI3K, d'un inhibiteur du checkpoint immunitaire voire d'un MEK inhibiteur (selon les sous catégories de TTN) pourrait bousculer ce schéma séquentiel anthracycline-taxane.
→ Pour les tumeurs HER2+.
Un schéma contenant anthracycline et taxane en séquentiel + trastuzumab permet l’obtention d’un taux élevé de RHC de l’ordre de 50%, plus important encore si l’on ne considère que les tumeurs RH-, pour lesquelles la RHC est aussi un biomarqueur de survie à long terme. Un schéma sans anthracycline (même si ces dernières gardent légitimement leur place) mais avec du carboplatine apporte des résultats similaires en termes de RHC et a l’avantage d’introduire très tôt le trastuzumab. Un double blocage HER2 (de type trastuzumab + pertuzumab) pouvant à lui seul apportait des taux de RHC intéressant, notamment dans la population de femmes ayant une tumeur RH-, une réflexion doit être menée pour proposer une désescalade raisonnée de la CNA : ne pas en faire à celles qui n'en n'ont pas besoin, pour limiter en particulier la toxicité, ou seulement du paclitaxel hebdo par exemple; toutes la difficulté et donc le challenge va être d'apprendre à identifier ces patientes. Dans la population ayant une tumeur RH+, nettement moins chimio-sensible, une réflexion concernant l’introduction précoce d’une hormonothérapie, compte tenu de l'effet addictif des voies HER2 et du récepteurs aux estrogènes, sans cytotoxique ou avec désescalade de ces derniers, voire d’autres thérapies ciblées doit être conduite. A l'avenir, les études cliniques qui s'intéresseront au traitement néoadjuvant des tumeurs HER2+ devront séparées les tumeurs RH-, des tumeurs RH+ et intégrer d'autres biomarqueurs (tel que statut PI3KCA, l'hétérogénéité intra-tumorale d'expression de HER2... ).
→ Pour le tumeurs RH+ et HER2-.
Ces tumeurs s’avèrent globalement très nettement moins sensibles à un schéma séquentiel comportant anthracycline et taxane si l’on tient compte des taux de RHC qui n'excèdent pas 20%. Deux études cliniques prospectives conduites chez des femmes ménopausées n'ont pas montré de supériorité en termes de réponse et de taux de conservation mammaire d'une chimiothérapie par rapport à une hormonothérapie. Toutefois, plus que la RHC, la variation du KI67 et/ou le PEPI (Preoperative Endocrine Prognostic Index) score seraient davantage corrélés au risque de rechute pour ces tumeurs. Une alternative à la CNA pourrait être une hormonothérapie combinée à une thérapie ciblée (tel qu’un PI3K ou CDK4/6 inhibiteur voire un inhibiteur du checkpoint immunitaire), avec l'étude de nouveaux biomarqueurs et des mécanismes de résistance. Des études sont en cours.
Pourrait-on individualiser la CNA en monitorant précocement la réponse ?
Des biomarqueurs précoces de la réponse (biopsies tumorales répétées ou examens d’imagerie moléculaire) pourraient être utilisés pour personnaliser la CNA. Par exemple, plusieurs études rétrospectives, notamment dans les cancers HER2+ mais aussi TN, ont montré la possibilité de prédire la RHC grâce aux variations de fixation entre une TEP au 18F-FDG réalisée avant tout traitement et une TEP faite après 1 ou 2 cycles. L'étude prospective AVATAXER avait pour objectif d'évaluer la capacité du bévacizumab, en association avec le trastuzumab et le docétaxel, à augmenter la proportion de RHC lorsque la TEP prédit précocement une mauvaise réponse. L'évaluation précoce par TEP a permis d'identifier les patientes qui ne répondaient pas au traitement néo-adjuvant associant docétaxel et trastuzumab avec une valeur prédictive négative de 75%. L'introduction du bévacizumab a alors permis de majorer les chances de RHC, qui sont passées de 24 à 48%. Enfin, l’étude prospective allemande WSG ADAPT démontre que la qualité de la réponse histologique peut être anticipée en réalisant une biopsie précoce de la tumeur primitive (après un cycle) pour adapter la suite du projet thérapeutique.
Quelles seraient les alternatives selon le profil immunohistochimique des tumeurs ?
→ Pour les tumeurs triple-négatives (TNN).
Un schéma contenant une anthracycline et un taxane, en séquentiel, conduit à des taux de réponse histologique complète (RHC), biomarqueur indiscutable de survie à long terme pour ces tumeurs, de 30 à 40%. Cependant, il existe une importante différence de chimio-sensibilité liée i) au micro-environnement tumoral (la quantité de TILs est un facteur de RHC) et ii) à la diversité moléculaire des TTN (selon la classification de Lehmann notamment: par exemple les TTN dites LAR, riches en récepteurs aux androgènes, affichent de très faibles taux de RHC mais ont pourtant un "bon pronostic" alors que les tumeurs dites BL1 -Basal Like 1- sont celles pour lesquelles le taux de RHC est le plus élevé après une chimiothérapie séquentielle, qui de plus est corrélée à la survie). Un faisceau d’arguments cliniques et biologiques n’est pas en faveur de l’abandon des anthracyclines. Des schémas sans taxane (mais avec sel de platine) pourraient se discuter dès lors qu’il existe des anomalies de la recombinaison homologue (HRD) et sont en cours d’évaluation. Plusieurs études prospectives ont démontré que le carboplatine majore le taux de RHC, mais au prix d’une toxicité, surtout hématologique, plus importante et le bénéfice en survie n’est pas démontré. De plus, de nombreuses questions demeurent sans réponse: quel est le schéma/dose optimal(e) d'administration du carboplatine et pour quelles patientes (mutées ou pas BRCA) ou pour quelles tumeurs (avec ou sans anomalie de la HRD) ? Enfin, l’étude du NSABP-B40 montre que l’ajout d'un anti-métabolite (capécitabine ou gemcitabine) à un traitement séquentiel ne majore pas le taux de RHC. La prescription à l'avenir de thérapies ciblées de type inhibiteur de PARP, inhibiteur du récepteur aux androgènes +/- de PI3K, d'un inhibiteur du checkpoint immunitaire voire d'un MEK inhibiteur (selon les sous catégories de TTN) pourrait bousculer ce schéma séquentiel anthracycline-taxane.
→ Pour les tumeurs HER2+.
Un schéma contenant anthracycline et taxane en séquentiel + trastuzumab permet l’obtention d’un taux élevé de RHC de l’ordre de 50%, plus important encore si l’on ne considère que les tumeurs RH-, pour lesquelles la RHC est aussi un biomarqueur de survie à long terme. Un schéma sans anthracycline (même si ces dernières gardent légitimement leur place) mais avec du carboplatine apporte des résultats similaires en termes de RHC et a l’avantage d’introduire très tôt le trastuzumab. Un double blocage HER2 (de type trastuzumab + pertuzumab) pouvant à lui seul apportait des taux de RHC intéressant, notamment dans la population de femmes ayant une tumeur RH-, une réflexion doit être menée pour proposer une désescalade raisonnée de la CNA : ne pas en faire à celles qui n'en n'ont pas besoin, pour limiter en particulier la toxicité, ou seulement du paclitaxel hebdo par exemple; toutes la difficulté et donc le challenge va être d'apprendre à identifier ces patientes. Dans la population ayant une tumeur RH+, nettement moins chimio-sensible, une réflexion concernant l’introduction précoce d’une hormonothérapie, compte tenu de l'effet addictif des voies HER2 et du récepteurs aux estrogènes, sans cytotoxique ou avec désescalade de ces derniers, voire d’autres thérapies ciblées doit être conduite. A l'avenir, les études cliniques qui s'intéresseront au traitement néoadjuvant des tumeurs HER2+ devront séparées les tumeurs RH-, des tumeurs RH+ et intégrer d'autres biomarqueurs (tel que statut PI3KCA, l'hétérogénéité intra-tumorale d'expression de HER2... ).
→ Pour le tumeurs RH+ et HER2-.
Ces tumeurs s’avèrent globalement très nettement moins sensibles à un schéma séquentiel comportant anthracycline et taxane si l’on tient compte des taux de RHC qui n'excèdent pas 20%. Deux études cliniques prospectives conduites chez des femmes ménopausées n'ont pas montré de supériorité en termes de réponse et de taux de conservation mammaire d'une chimiothérapie par rapport à une hormonothérapie. Toutefois, plus que la RHC, la variation du KI67 et/ou le PEPI (Preoperative Endocrine Prognostic Index) score seraient davantage corrélés au risque de rechute pour ces tumeurs. Une alternative à la CNA pourrait être une hormonothérapie combinée à une thérapie ciblée (tel qu’un PI3K ou CDK4/6 inhibiteur voire un inhibiteur du checkpoint immunitaire), avec l'étude de nouveaux biomarqueurs et des mécanismes de résistance. Des études sont en cours.
Pourrait-on individualiser la CNA en monitorant précocement la réponse ?
Des biomarqueurs précoces de la réponse (biopsies tumorales répétées ou examens d’imagerie moléculaire) pourraient être utilisés pour personnaliser la CNA. Par exemple, plusieurs études rétrospectives, notamment dans les cancers HER2+ mais aussi TN, ont montré la possibilité de prédire la RHC grâce aux variations de fixation entre une TEP au 18F-FDG réalisée avant tout traitement et une TEP faite après 1 ou 2 cycles. L'étude prospective AVATAXER avait pour objectif d'évaluer la capacité du bévacizumab, en association avec le trastuzumab et le docétaxel, à augmenter la proportion de RHC lorsque la TEP prédit précocement une mauvaise réponse. L'évaluation précoce par TEP a permis d'identifier les patientes qui ne répondaient pas au traitement néo-adjuvant associant docétaxel et trastuzumab avec une valeur prédictive négative de 75%. L'introduction du bévacizumab a alors permis de majorer les chances de RHC, qui sont passées de 24 à 48%. Enfin, l’étude prospective allemande WSG ADAPT démontre que la qualité de la réponse histologique peut être anticipée en réalisant une biopsie précoce de la tumeur primitive (après un cycle) pour adapter la suite du projet thérapeutique.
Messages clefs/take home message
Si une chimiothérapie séquentielle, anthracycline et taxane, est aujourd'hui le traitement néoadjuvant standard, il apparaît que :
- pour les TTN, un changement avec l'introduction du carboplatine (peut être à la place du taxane) pour un sous-groupe, encore à déterminer pourrait rapidement se profiler.
- pour les tumeurs HER2+, une désescalade raisonnée pourrait être réfléchie i) dans la population RH-, du fait des résultats obtenus avec le double blocage HER2 et ii) dans la population RH+ en ajoutant par exemple une hormonothérapie à la thérapie anti-HER2 voire une autre thérapie ciblée.
- pour les tumeurs RH+/HER2-, bien souvent moins chimio-sensibles, des stratégies sans cytotoxique mais avec hormonothérapie et autres thérapies ciblées pourraient être proposées.
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